Guinée : Le 28 septembre, une date pour deux commémorations

Statue faite à l'esplanade du Palais du peuple de Conakry, en mémoire aux héros nationaux

Le 28 septembre, une date autre fois rassembleur, divise depuis des années des guinéens qui sont partagé entre fierté et tristesse. 

 » Nous préférons la liberté dans la pauvreté, à l’opulence dans l’esclavage  » cette phrase, presque tout le monde s’en souvient. Elle a été prononcée pour la première fois le 28 septembre 1958, par Ahmed Sekou Touré père de l’indépendance guinéenne, à l’occasion du non de Guinée à la colonie française du Général De Gaulle. 

Le non de la Guinée exprimé au referendum en 1958. Image prise sur le net.

 Depuis ce jour, le 28 septembre est érigé en Guinée parmi les dates mémorables de son histoire afin de rappeler le passé glorieux du pays à ses fils et filles. Sauf que, depuis quelques années, les regards ont changé sur cette date autre fois hautement symbolique laissant place au chagrin, suite aux événements du 28 septembre 2009 qui ont fait des morts et des blessés au stade du même nom,  en marge d’une manifestation politique de l’opposition réprimée. 

Une tragédie qui dès ce jour, plonge les guinéens à la fois dans un moment de joie et de consternation, quant à la célébration de la date du 28 septembre qui représente désormais deux événements totalement distincts. 

“Le 28 septembre pour moi, est un jour de la dignité guinéenne”

Quoiqu’elle ait été entachée par les événements malheureux de 2009, le 28 septembre reste dans l’esprit de beaucoup de guinéens comme une date historique et symbolique. 

Ahmed Sékou Touré, Général De Gaule et Telly Diallo le jour de la proclamation des résultats du référendum et du discours poignant de Sékou Touré

“Le 28 Septembre est une date symbolique aussi bien pour la Guinée que pour les anciennes Colonies Françaises” a affirmé Kémoko Touré ancien directeur de la société des bauxites de guinée. 

De quoi rendre fier Mohamed Doumbouya jeune guinéen pour qui ‘’le 28 Septembre est pour moi le jour de la dignité guinéenne’’ qui renchérit toujours ”Une date fondatrice, qui donnait l’occasion pas seulement à la Guinée mais à toutes les colonies francophones de déterminer leur avenir. Choisir entre le projet de communauté proposée par la France et l’autonomie, la liberté, la dignité” .  Journée généralement au cours de laquelle, les guinéens ne tarissent pas d’éloges à l’endroit des compagnons de l’indépendance notamment, le leader Ahmed Sékou Touré. 

 Malgré la fierté suscitée par cette date, le consultant industriel Kémoko Touré reconnaît tout de même, quelques manquements intervenus au lendemain de ce pas déterminant pour son pays ‘’tout s’est passé en effet en Guinée comme dans la plupart des autres pays libérés d’Afrique Noire comme si l’indépendance, la liberté et la prospérité appartenaient plus à l’élite dirigeante qu’au peuple”. 

Autant glorieuse elle aura été l’histoire d’un pays, il ne faut pas perdre de vue qu’elle est faite de hauts et de bas comme le rappelle l’écrivain et homme des mines qui s’est exprimé à notre micro sans langue de bois ‘’ depuis les massacres jusqu’à présent restés impunis du 28 septembre 2009, cette date a beaucoup perdu de sa charge symbolique en République de Guinée.  Par ailleurs, les ethno stratégies entretenues par les dirigeants politiques contribuent à réduire le sentiment d’appartenance à la même Nation et rendent suspectes toutes les tentatives de rétablissement de la Vérité des faits’’ .

 ‘’Ce jour, j’ai perdu mon fils aîné” 

Le 28 septembre 2009, un lundi noir dont se souviendra certainement pour toujours Asmaou Diallo et les 500 et quelques autres familles et victimes de ce massacre. Celle qui est aujourd’hui la présidente de l’association des victimes, parents et amis du 28 septembre (AVIPA), attend toujours que justice soit rendue dans cette affaire 11 ans après  “ On demande justice ’’ a-t-elle dit avant de poursuivre “ nous allons continuer à  croire, nous n’allons pas nous décourager jusqu’à ce que justice soit faite ”

Photo d’amateur prise le 28 septembre 2009 au stade du même nom, au moment où les manifestants tentaient de s’échapper en escaladant les bars de fer et le mur dudit stade.

ce combat à la tête duquel dame Asmaou répond aujourd’hui, elle ne l’a pas voulu mais cela s’est imposé en elle après que son fils soit tué. “ Ce jour j’ai perdu, j’ai perdu mon fils ainé de Mohamed Aly Conté qui était âgé de 33 ans au moment des faits. C’est à la suite de ce meurtre, que je me suis engagé dans la lutte contre l’impunité “

La douleur de perdre un proche ou un parent, est toujours vive chez ces victimes qui ont du mal à faire leur deuil et passer à autre chose. Ils s’impatientent que justice soit rendue nous a confié la présidente de l’AVIPA. 

Où en est la justice? 

“Crime contre l’humanité”, c’est la qualification juridique donnée à cette affaire par les juristes et experts onusiens dans laquelle est incriminée, les forces de défenses et de sécurité guinéennes à l’époque sous le commandement du Capitaine Moussa Dadis Camara. 

Les hommes en tenue, sont accusé d’avoir violés, battus et tués des guinéens qui s’opposaient au régime militaire de 2009, qu’ils soupçonnaient de ne pas vouloir rendre le pouvoir aux civils. Une manifestation réprimée dans le sang, qui fera plus de 100 morts, des blessés et disparus.  

Les membres CNDD et leur leader le capitaine Moussa Dadis Camara, présumés auteurs du massacre du 28 septembre 2009

Alors que l’instruction sur cette affaire est close depuis 2019 par la cour suprême guinéenne, soit 10 ans après les faits, le procès peine toujours à se tenir. un procès qui tient selon de nombreuses langues, à une volonté politique. Dans tous les cas, l’affaire ressemble à une patate chaude dans les mains des ministres guinéens de la justice ayant jusqu’ici  occupé ce poste, où personne ne veut se brûler les mains. 

Annoncé pour fin 2018, ensuite juin 2020, rien ne semble jusque là se profiler à l’horizon, même après  que le principal mis en cause dans cette affaire le Capitaine Moussa Dadis Camara en exil au Burkina Faso, ait exprimé l’envie de rentrer en Guinée pour se mettre au service de la justice. 

En attendant de savoir à quand prendra fin ce jeu de passe passe pour faire toute la lumière dans l’affaire dite de massacre au stade de Conakry en 2009, l’histoire elle,  continuera à nous rappeler ce passé glorieux et triste des 28 septembre dans une même Guinée. une façon de rappeler, que “l’histoire est têtue” comme le rappelait le congolais Donatien De Dieu Citundu Mayombo. 

Ecrit par Aissata Camara

2 Replies to “Guinée : Le 28 septembre, une date pour deux commémorations”

  1. Kiemdé Christelle dit :

    Félicitations pour cette brillante idée de créé ce web média. Nous jeunes nous préférons être connectés que d’écouter la radio et souvent même la télévision. Chapeau à toi. Farafyna, j’aime bien ce nom. Merci de nous rappeler cette histoire de la Guinée.

  2. Aïss DIARRA dit :

    Plein de succès à notre nouveau né

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